En préparation depuis deux ans, le jeu Odyssian Blaze se lance cette semaine sur Kickstarter ! Une bonne occasion d’interviewer l’équipe pour en apprendre plus sur leurs inspirations, leurs motivations et leur manière de travailler.
Premièrement, je te propose de te présenter toi, ton équipe et votre projet.
Je suis Erthrust (graphiste) et je travaille aux côtés de Kwartz (scénariste principal), DonTag et Pav (développeurs) pour le studio LIBRASTRAL. Passionnés depuis l’enfance de mangas, de jeux vidéo et de jeu de rôle sur table, nous aimons créer et nous épanouir dans les milieux artistiques.
Nous réalisons ensemble le jeu Odyssian Blaze, un visual novel sur le thème des mythologies. Dans cette aventure, on a la possibilité de choisir entre 2 avatars, un jeune homme nommé Julio, et une jeune femme nommée June. Au-delà d’un genre, c’est surtout le choix entre 2 personnalités bien distinctes à incarner, où chaque dialogue et possibilité changent en fonction du personnage choisi.
L’univers d’Odyssian Blaze se passe sur Terre, où un bon nombre de divinités ont été bannies et se retrouvent à vivre aux côtés des humains. Cette cohabitation va déclencher de nombreux conflits, notamment des guerres théologiques qui plongent le monde dans le chaos. Votre héros va alors se retrouver à partir en plein voyage initiatique à travers six royaumes, et sera amené à prendre des décisions capitales. Il pourra forger des relations amicales, mais aussi romantiques — et ce avec tous les personnages, quel que soit son genre — et s’unir avec les dieux pour sortir triomphant des épreuves célestes de l’Olympe.
Notre sujet principal, c’est l’humanité. Et pour mieux parler de l’espèce humaine et de sa société, pour la questionner sous tous ses angles, nous avons trouvé intéressant de la confronter avec une espèce supérieure, les divinités.
Quel est votre parcours ?
J’ai fait une école de communication visuelle (Campus Fonderie de l’Image) et je travaille pour différentes agences pour lesquelles je réalise toutes sortes de visuels. DonTag et Pav sont diplômés d’une école de développement informatique (Ingésup – Ynov Paris). Quant à Kwartz, il a aussi suivi le même parcours que le mien, avant de se réorienter dans le droit, où il a été greffier pendant 4 ans. Finalement, sa passion créative a fini par l’emporter et il a (enfin !) décidé de se concentrer avant tout sur l’écriture.
Comment en êtes-vous arrivé au visual novel ?
Le scénario a pour nous toujours été l’élément le plus important dans un jeu ! On passait des heures et des heures sur des RPG, qui n’avaient peut-être rien d’extraordinaire graphiquement, mais dont les histoires nous ont bercés et nous faisaient rêver.
C’est vrai qu’aujourd’hui les avancées techniques sont incroyables, et on a l’impression que la ligne directrice de certaines productions décide parfois de placer l’aspect narratif en second plan. Pour nous, il était au contraire essentiel de placer ce point en priorité.
L’idée de réunir une ronde d’artistes, que ce soit des illustrateurs, des coloristes ou des musiciens, mettant toutes leurs énergies créatives en commun autour d’un seul et même texte, était un concept qui nous séduisait tout particulièrement. C’est cette synergie entre ces différents types d’arts, tous gravitant autour de l’écriture, qui permet au visual novel de raconter des histoires de manière unique, et qui nous séduit pour choisir ce genre.
Parlez-moi un peu de vos inspirations pour ce projet, tous médiums confondus !
Nous jouons beaucoup à des JRPG, qui sont une vraie source d’inspiration pour nous. Pour l’équipe scénaristique, la saga Suikoden est une œuvre qui a complètement façonné leur façon d’écrire de manière générale. C’est un jeu vidéo plutôt rétro qui met en scène des guerres et des conflits politiques aux multiples points de vue, montrant que chacune des parties impliquées possèdent leurs propres façons de voir le monde.
Au niveau des graphismes et de l’ambiance générale, la saga des Tales Of ou l’univers de Fire Emblem font aussi partie de nos inspirations principales. En effet, nous aimons beaucoup leur façon de rendre des univers médiévaux-fantastiques aussi colorés et prenants.
Sinon en visual novel, il y a bien sûr la saga Phoenix Wright qui a particulièrement marqué les joueurs de notre équipe, puis aussi certaines références occidentales comme Mass Effect ou bien The Wolf Among Us.
Adeptes du jeu de rôle sur table « fait main », ces séances nous ont également énormément inspirés et nourrissent continuellement notre fantaisie.
Enfin, il y a bien sûr les récits mythologiques sur lesquels nous puisons la majorité de nos inspirations, qui sont d’une richesse créative infinie. C’est pourquoi les auteurs ont effectué énormément de recherches avant de construire l’univers d’Odyssian Blaze.
Vous affichez votre envie de donner beaucoup de liberté au joueur, comment réussissez-vous à garder l’équilibre entre cette vision et la charge de travail ?
Honnêtement, c’est là le plus gros challenge ! Déjà, le visual novel, c’est un genre plutôt de niche, et qui en plus est généralement divisé en plusieurs catégories. Il y a les otome, les galge, les BL, les GL et plein de sous-catégories encore. Notre objectif était de dépasser ces étiquettes et de proposer un contenu qui permettrait de réunir tous les amateurs de visual novel dans un seul et même jeu.
La première étape dans ce processus était de laisser la possibilité au joueur de choisir le genre du personnage principal qu’il souhaite incarner, ce qui est plutôt rare dans les visual novels. Mais nous ne voulions pas juste d’une histoire qui se contente de changer les accords au féminin ou au masculin dans le texte, nous voulions qu’ils aient une vraie personnalité propre. Cela engage une charge de travail considérable, mais c’est aussi un réel plaisir de défendre cette volonté.
Nous tenions également à laisser la liberté au joueur de pouvoir entretenir une relation romantique avec le personnage de son choix, et ce peu importe le genre du protagoniste choisi. Il peut donc y avoir des romances hétéros comme homos ; les protagonistes voyant autrui avant tout comme des « personnes » plutôt que des genres, toutes les combinaisons sont ainsi possibles ! Cela demande à notre équipe presque le double du travail, car il faut à chaque chapitre intervenir doublement sur le texte, les CG et tout ce qui est visuel.
Ensuite il a fallu prévoir les nombreux embranchements de la trame scénaristique. Il y a un travail monstre pour les auteurs ! Au sein de ce premier chapitre, il y a 6 fins différentes et 24 variantes, en comptant les deux avatars. En chiffres, cela équivaut à peu près à 50 000 mots.
Pour y arriver, on a vite compris que le point fondamental était d’avoir une organisation la plus fine possible ! À la fois pour se répartir la charge de travail, mais également pour avoir en tout temps une vue d’ensemble sur les différentes avancées du jeu. On échange aussi énormément au sein de l’équipe pour essayer de rendre le tout le plus fluide possible, et limiter ainsi les aller-retours. Je vous rassure, ça ne veut pas dire qu’on arrive à chaque fois à avoir une organisation des plus optimales (haha), mais on reste particulièrement vigilants sur cet aspect. Je dois dire aussi que depuis que les bêta-tests avaient commencé, nous avons été galvanisés par le retour des joueurs qui ont profondément aimé ces libertés. Recevoir autant de messages qui nous remercient de faire un « jeu inclusif », ou parce qu’ils ont adoré rejouer au jeu avec les 2 avatars est un vrai moteur pour nous. Cela ne fait qu’accroître notre volonté et ainsi redoubler d’efforts pour garder cet équilibre entre nos missions, et notre vision.
Quel est le business model que vous souhaitez adopter pour le jeu ?
L’une de nos principales envies était de créer un univers bien défini et d’axer notre visual novel sur le thème du voyage. Rien qu’en écrivant les deux premiers chapitres, on y posait seulement les bases de l’histoire que nous voulions raconter. Afin de trouver un modèle économique qui nous permettait de développer une histoire de longue haleine, nous avons opté pour des parutions par chapitres. Cette façon de faire nous permettait ainsi de prendre le temps de développer l’histoire et les personnages.
L’aspect freemium était une forte envie de notre part, puisque nous voulions que le plus de personnes puissent en profiter. Néanmoins, un studio ne peut vivre sans aucun aspect payant, c’est pourquoi nous avons développé un système qui bloque, seulement à certains moments définis, le récit. En utilisant des points nommés « chronos », cela permet de passer ces barrières de temps. Il était très important pour nous que ces moments de blocage n’interviennent qu’à certains moments précis, et non à chaque action entreprise par le protagoniste. Nous voulons laisser au joueur le plaisir de découvrir librement l’univers, de parler aux personnages et d’observer tous les éléments sans contraintes. Des costumes pour les personnages et scénarios supplémentaires seront également proposés aux joueurs, afin de soutenir le développement du jeu.
En outre, nous avons décidé d’une plateforme sur navigateur, sans téléchargement, dans l’optique de proposer notre jeu à des personnes moins initiées par le monde du jeu vidéo et qui n’ont pas forcément de consoles ou de compte Steam. C’est la solution qui nous semblait la plus simple et la plus accessible pour réunir les habitués et les moins habitués, motivés juste par l’envie de lire une histoire.
Comment est constituée votre équipe ? Comment organisez-vous votre production (par exemple si vous travaillez avec des personnes à distance) ?
Le noyau central est composé de 4 personnes (scénariste et graphiste qui travaillent depuis le même endroit, et 2 développeurs).
Je m’occupe de la partie graphique principale, notamment du chara design et du webdesign. Nous avons également collaboré avec plusieurs artistes pour illustrer en particulier les décors du jeu. Les artistes Mochi, Queen Lolippopo, Toto, Ambre Ladret et Timyah ont tous apporté leurs créativités pour développer l’architecture d’Odyssian Blaze. Au niveau du développement, il est donc assuré par deux personnes, DonTag et Pav. Bien qu’il existe plusieurs logiciels open source pour développer des visual novels, nous avons voulu faire notre propre développement afin de pouvoir y insuffler les fonctionnalités que l’on souhaitait. Il y a eu également plusieurs musiciens qui ont contribué à faire vivre le projet, Jeanne-Peri Foucault qui compose beaucoup plus pour le cinéma, mais qui a été très inspirée par l’univers, Sébastien Mai-Nhu, un passionné de musique qui a d’ailleurs composé le thème principal d’Odyssian Blaze, Malik Yahihi qui a fait un super travail pour le trailer et les scènes de nuit, et Nicolas Wesolek qui a également composé quelques morceaux. Enfin, Christopher Germany et Fabien Poujoulat qui ont assuré l’entière traduction du chapitre 1, en anglais, nous ont apporté une aide remarquable.
Tous ces artistes, que ce soit les illustrateurs ou les musiciens, sont guidés par un cahier des charges très précis écrit par Kwartz et son cercle d’auteurs, qui leur détaille au mieux tout ce qui est désiré. Il a toujours une idée très précise en tête, mais souhaite également laisser un champ libre aux artistes afin qu’ils puissent exprimer leur vision de l’œuvre librement.
C’est vrai qu’il est parfois difficile de synchroniser tous nos emplois du temps, surtout que pour la plupart des personnes impliquées, ils exercent une autre activité à côté et font ça sur le temps libre, ce qui est mon cas par exemple. En outil de travail, on utilise surtout Trello pour suivre les missions de chacun, Discord pour faire des appels groupés et Skype lorsqu’on a besoin de faire des partages d’écrans. Puis quand c’est possible ou nécessaire, on fait des réunions IRL.
Cette semaine vous vous lancez sur Kickstarter, quels sont vos objectifs et comment vous êtes-vous préparés ?
Cela fait environ deux ans que nous travaillons sur la conception du jeu. Nous avons produit ce premier chapitre avec tous les moyens économiques et énergiques dont on disposait. De nombreuses personnes ont aussi accepté de nous aider sans rien nous demander en retour, simplement parce qu’ils étaient motivés par le projet. Tout ça nous a permis de réaliser cette démo d’Odyssian Blaze, et de pouvoir montrer aux joueurs son univers et vers quel type d’œuvre on aspire.
Aujourd’hui, si on veut développer la suite et continuer à solliciter les artistes qui nous ont accompagnés quasi bénévolement pendant 2 ans, il nous est impératif d’obtenir des financements.
On a misé tout l’avenir de notre campagne sur la démo du jeu, en espérant qu’elle plaira aux plus de joueurs et qu’ils seront sensibles à l’univers qu’on a voulu lui insuffler. Nous espérons qu’ils se mobiliseront afin d’allumer tous ensemble la flamme de l’Odyssée !
Merci à Erthrust et à toute l’équipe d’Odyssian Blaze pour cet entretien !
Vous pouvez essayer ou soutenir leur projet ici, qui a déjà accumulé plus de la moitié de la sommes demandée !
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